prêts exotiques et bénéfices fantômes...
Des prêts neg-ams à profusion...
Dans l'article précédent, on a étudié le danger des prêts "neg-ams", qui appâtent le client à l'aide de "mensualités minimum" défiant toute concurrence, mais dont les mensualités font plus que doubler après la période "promotionnelle" de 3 ans environ.
Voici quelques statistiques récentes sur l'importance de ces prêts dans le système bancaire américain.
David Liu, spécialiste du crédit hypothécaire chez UBS estime que 40% des prêts supérieurs à 360 000$ contractés en 2005 aux USA sont des prêts de type « Neg-Am » (70% des emprunteurs choisissant l'option « paiement minimum » en 2005, 80% d'après les dernières études).
On est évidemment bien loin des 0,7% de prêts à problèmes décrits par les économistes optimistes.
Ce qui est très grave est que la capacité de remboursement et l'autorisation de crédit est calculée par les banques sur la base de ce paiement minimum : un emprunteur dont la capacité d'emprunt était de 200 000$ pour un prêt classique pourra ainsi se voir autorisé « miraculeusement » un crédit de 400 000$ qu'il sera évidemment totalement incapable de rembourser au delà de la période « remboursement minimum » quand le prêt sera transformé et que la mensualité sera multiplée par 2 ou 3
Selon cet autre article de businessweek, 389 milliards de $ de prêts « neg-am » ou « interest-only » ont été accordés en 2004 et 2005, les tendances de 2006 étaient estimées à plus de 300 nouveaux milliards de $.
Jusqu'ici ces prêts ont donné lieu à très peu de faillites : la majorité ayant été souscrite en 2004 et après, les emprunteurs sont encore dans la phase indolore de « mensualités minimum ».
A partir de 2007, les premières vagues « transformations de prêt » (le moment ou la mensualité est multipliée par 2 ou 3 instantanément) auront lieu, et le phénomène va s'accélérer en 2008 et 2009.
On aura alors une vague de faillites infiniment plus importante que la vague actuelle qui porte sur les seuls emprunteurs à haut-risque (subprime-loans). Cette fois même les emprunteurs qu'on croyait « sans risque » ("prime") ou « modérément à risque (« alt-A ») seront frappés, car les ménages capables de faire face à un doublement (ou un triplement) de leur mensualité ne courent pas vraiment les rues.
La nouvelle norme comptable internationale :
Les bénéfices fantômes.
Grâce aux prêts « Neg-Ams », les banques vont réaliser un tour de magie assez étonnant expliqué dans le même article de businessweek :
Elle sont en effet autorisées par les normes comptables en vigueur à faire comme si l'emprunteur choisissait l'option « remboursement maximum » pour calculer leurs bénéfices alors que 80% choisissent l'option « remboursement minimum » en attendant le « choc » associé à la transformation du prêt : une banque peut ainsi pour un prêt donné prendre en compte dans le calcul de son bénéfice 899$ de mensualités (remboursement maximum normal), même si l'emprunteur ne lui verse que 325$ (mensualité minimum).
Il y a ainsi des bénéfices « fantômes » qui sont publiés chaque trimestre dans les comptes de diverses banques, basés sur des remboursements imaginaires qui ne viendront jamais.
L'article de businessweek, donne ainsi l"exemple d"Harold, un citoyen touchant 1600 $ de revenus mensuels, a qui la société washington mutual a accordé un prêt pour une maison de 150 000$.
Harold n'a même pas les moyens de rembourser un prêt « interest only » c'est à dire de rembourser les seuls intérêts d'un prêt normal (1353$ / mois pour 1600$ de revenu).
Peu importe, la banque lui a quand même accordé un prêt « neg-am » débutant à 899$ (ce qui fait déjà 56% de son revenu), lequel neg-am étant destiné à faire plus que doubler 3 ans après le début du prêt. Harold sera évidemment incapable de faire quoi que ce soit avec ses 1600 $ de revenus.
Dans ses écritures comptables, la société « washington mutual » fait comme si Harold remboursait 1454$ chaque mois (option maximum du prêt « neg-am »), et a le droit de le faire selon les règles comptables actuelles, alors qu'elle ne reçoit que 899$ de la part d'Harold !
Avec toute cette créativité financière, la déflation a de beaux jours devant elle !