Les plans de relance : une démarche condamnée d'avance.

Publié le par loïc abadie

Il est absurde de prétendre résoudre une crise provoquée par un excès de dette par encore plus de dettes. C'est pourtant ce qu'essaient de faire actuellement les gouvernements des USA et d'Europe. Voyons plus en détail les montants qui seraient nécessaires :

1) Avec la crise, les ménages auront tendance à se remettre à épargner, vu qu'ils seront moins confiants dans l'avenir.
Le passage d'un taux d'épargne de 0% (situation d'avant-crise aux USA) à un taux d'épargne normal de 8% (moyenne historique) retirerait 800 milliards à la consommation.
2) Il y a environ 35000 milliards de dettes en excès dans le système US (en faisant l'hypothèse d'un retour à des ratios d'endettement normaux de 100% du PIB). Si cet excès était résorbé sur 15 ans (sous forme de remboursement et de faillites), cela représenterait environ 2300 milliards de $ annuels.
3) La croissance artificielle d'avant-crise était basée sur un flux annuel d'accroissement de la dette de 4000 milliards de $ par an (valeurs moyennes observées en 2006 et 2007).

Si l'état veut compenser par ses interventions les effets de la crise, il devra à la fois : 

- compenser le retour des ménages à un taux d'épagne normal.
- compenser la réduction de la dette en excès (faillites et remboursements de crédits).
- rétablir l'accroissement de la dette à son niveau précédent, puis l'amplifier (vu qu'une croissance basée sur une fuite en avant dans le crédit nécessite une hausse exponentielle de la dette, chaque $ de dette en plus ayant de moins en moins d'effet, de même qu'un drogué a besoin de doses toujours plus fortes).

Au total, il faudrait pour commencer injecter 7100 milliards (800 + 2300 + 4000) dans l'économie chaque année. Soit l'équivalent de 8 plans Obama par an.
Ces montants impliqueraient : 
- Un déficit public égal à 45-50% du PIB.
- Une doublement de la dette publique nette US en moins d'un an.

Inutile de dire qu'un état qui se lancerait dans ce type de solutions ne trouverait plus de financeurs très rapidement et serait mis en situation de faillite. Aucune politique économique au monde, même proposée par un prix Nobel d'économie, ne peut permettre la poursuite éternelle d'un schéma de Ponzi.

Certains répondront « un coup d'inflation et tout repart comme avant »...Ont-ils simplement une idée de la gravité de la crise au Zimbabwe ?
Parce qu'il faut bien être conscient que ce n'est pas une inflation "gentille" à 7-10 % / an qui règlerait les problèmes actuels : il faudrait à ce rythme plus de 10 ans pour résorber l'excès de dette, et entre temps, la hausse des taux aura achevé le peu de résistance qui reste à nos économies...Sans compter que résorber l'excès de dette ne permettrait même pas à la machine de repartir (si on vise le rétablissement du système précédent), vu que notre système avait besoin d'une hausse exponentielle de la masse de crédit pour rester à flot.

Donc : 

- Les plans type Obama, Paulson ou autres échoueront aussi rapidement que les précédents, et ne réussiront qu'à dégrader la situation financière des états qui les mettent en place. Si ils persistent dans leur impasse keynésienne, les dirigeants vont se trouver de plus en plus dépassés par la situation à chaque mois qui passe (ils le sont d'ailleurs déjà) : 
Les états devront devenir à la fois : 
- Banquiers.
- Constructeurs automobiles.
- Promoteurs immobiliers.
- Assureurs
- Transporteurs aériens
- Employeur universel
(...etc)

Au final, nous aurions des états qui récupèreront toutes les dettes en excès du système, mettraient en place une véritable « Union des Républiques socialistes des Etats-Unis et d'Europe »...République qui ferait bien vite faillite comme ses prédécesseurs parce que les pays émergents et les producteurs de matières premières n'auront aucun intérêt à continuer à fournir un groupe de pays dont les états sont devenus insolvables et produisent une monnaie de singe sous le prétexte de « relancer leur économie ».


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A
Billet de Paul Jorion :" La belle époque..." 11.02.09Loïc Abadie (12.02.09 à 13:42) répond :Vous ecrivez :“ Les pertes causées par les bulles financières quand elles éclatent dépassent désormais en taille la capacité d’absorption des États.” Voilà (enfin !) écrit ce qui constitue LE point essentiel de cette crise. Tant que cette évidence ne sera pas reconnue et prise en compte, les solutions proposées ne seront que du vent ou des sparadraps permettant de gagner quelques semaines ou quelques mois.Cela signifie en particulier :- Que les nationalisations ne résoudront pas le problème (qui a été créé par les politiques étatistes et keynésiennes d’expansion du crédit précédentes), mais aggraveront encore la situation.Désolé pour les nostalgiques de la nationalisation, mais le système entier étant massivement insolvable (dette totale US : 51 000 milliards de $, dette en excès > 35 000 milliards), ce n’est pas le fait de renommer “citigroup” en “US state group”, “bank of america” en “bank of US state” ou “general motors” en “US state motors” qui changera quoi que ce soit à la situation.Les dettes seront toujours là malgré le changement de propriétaire, et l’état US avec ses 2500 milliards de recettes annuelles et son budget qui n’était même pas à l’équilibre pendant la période faste d’avant crise n’aura jamais les moyens de garantir les montagnes de pertes qui vont déferler (les subprimes, CDO et dérivés de crédit ne sont que la partie émergée de l’iceberg, avec la récession qui s’amplifie, toutes les catégories de prêts, sans exception, vont être attaquées).Si l’état tente malgré tout de devenir le prêteur en dernier recours de tout le système jusqu’au bout, il deviendra à son tour insolvable (ou produira une monnaie “zimbabweenne”, ce qui revient au même), et nous aurons alors une catastrophe sans limites et une situation sociale incontrôlable à la place d’une crise grave.La seule solution raisonnable consiste à mettre en oeuvre une liquidation la plus ordonnée possible de la montagne de dettes en excès (et surtout pas de “relancer le crédit”), ce qui suppose :- Qu’il faut accepter que les faillites jouent leur rôle et participent de façon importante à liquidation des dettes en excès et que ceux qui ont pris trop de risques paient les conséquences de leurs choix.- Que les garanties de l’état, quand elles seront vraiment indispensables pour limiter l’effondrement du système (bank run généralisé), soient les plus limitées possibles, et soient associées à des négociations systématiques avec les créanciers visant à dévaluer leurs créances, donc à réduire les dettes (Vous voulez que l’état garantisse vos créances parce que vous avez peur que votre emprunteur fasse faillite ? ok, mais dans ce cas nous vous les rachetons à prix cassé, 50 ou 60% de leur valeur initiale, et c’est à prendre où à laisser).En clair, tout doit être mis en oeuvre pour réduire le montant des dettes dans le système économique, au lieu de chercher à l’augmenter comme le font les keynésiens en ce moment.- Qu’il y ait la mise en place d’un filet de secours minimal (le “revenu d’existence” dont je parle dans mon blog), ce “filet de secours” permettant simplement la survie et n’étant en aucun cas un outil permettant de vivre confortablement sans rien faire (sinon nous aurons dans la société au moins 95% de gens qui choisiront de ne rien faire et le système s’effondrera complètement).Ce filet de secours étant associé en contrepartie à une flexibilisation très importante du marché du travail (seule solution pour relancer le marché de l’emploi en temps de crise).#  Paul Jorion dit :12 février 2009 à 17:52@ Loïc AbadieJe partage en gros votre analyse. Nous rejetons en particulier vous et moi les approches keynésiennes : vous, il me semble, pour le rôle d’arbitre et de mécano qu’elles assignent à l’État, moi parce que ces approches sont timorées, ne s’attaquant qu’aux symptômes, jamais aux causes profondes.Le billet original dur le Blog Paul Jorion et tous ses commentaires :http://www.pauljorion.com/blog/?p=1898#comment-17050(alix.)
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S
allons de ce pas l'expliquer à mr Besancenot et à ces babyboomers cgtistes!
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B
La question de l'intervention des états est intéressante mais nous devons aller jusqu'au bout du raisonnement:Admettons que les états ne soient pas intervenus. Que se serait-il passé avec les banques? Quid de notre épargne?
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L
<br /> <br /> Relisez bien les articles et notamment celui-ci :<br /> <br /> <br /> http://tropicalbear.over-blog.com/article-27590557.html<br /> <br /> <br /> Je ne suis pas pour l'absence d'état et l'absence totale d'intervention, mais pour un état beaucoup moins interventionniste et de taille plus réduite. Ce n'est pas du tout la même chose.<br /> <br /> <br /> <br />
N
Bonjour Loic,et si le programme était alternatif?Au lieu de remplacer complètement, les Etats ne faisaient que partiellement leur mission( en privilégiant  1 stagflation?disons pour les US, un rythme de hausse du PIB au tiers, une hausse des impositions de 25%( permettant d'accroitre le Budget US de 2500 à 3000 M$ en taxant l'épargne des ménages( pour diminuer ce taux de 8% Lt et le ramener à 4%)). La dette privée serait laissée en l'état et 1 peu de relance avec un peu d'émission de $....On serait un peu de le cas de la crise de 1870 mais cette solution parait envisageable( je pense que les gouvernements savent qu'ils vont dans le mur en faisant de la monétisation pure et donc ils vont freiner du mieux possible( sans toutefois éviter la déflation des actifs).la déflation dans les prix de la consommation de tous les jours sera (pour moi) temporaire et s'il le faut je suis persuadé que les états feront fonctionner la planche à billets pour ruiner les rentiers et ceux qui grippent la consommation en restant "liquide"
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B
Avec une relance et une intervention de l'État, on évite aujourd´hui le chaos, la paralysie de l'économie, les émeutes, les famines... bref un carnage.La fuite en avant permet d'espèrer (au moins en théorie) de "gérer" ce désastre sur la durée, par exemple avec une inflation de 10 ou 15% par an, le fardeau des dettes accumulées serait rapidement allègé. Soit, une difficile période économique s'ouvrirait pendant une dizaine d'années mais une remise à zéro des compteurs serait envisageable à l'issu de cette crise. L´être humain est programmé pour oublier l'inéluctabilité de sa propre mort, il entreprend donc tout pour repousser l'échéance... on ne peut lui en vouloir...
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L
<br /> <br /> Certainement pas, une inflation à 10% / an, ce sont des taux longs à 12-14%, ce qui ne ferait qu'étrangler encore plus les emprunteurs en difficulté actuellement, et renforcer la crise bien avant<br /> que le fardeau des dettes ne soit allégé.<br /> <br /> <br /> Avec la multiplication des relances étatiques, non seulement on n'évite pas la crise, mais on la renforce. Tous les plans décidés jusqu'ici ont prouvé leur inefficacité totale (les articles<br /> expliquent pourquoi, à l'aide de chiffres précis), et le "carnage" que vous citez arrivera seulement dans un cas de figure précis : Celui où les états auront tellement cherché à "relancer" les<br /> économies qu'ils se mettront en situation de faillite.<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />